André GIDE




„Il n´y a pas d´œuvre d´art sans la collaboration du démon“ écrit Gide à propos de Dostojewski. Et il constate un peu plus loin: „Mahomet était épileptique, épileptiques les prophètes d´Israël et Luther et Dostojewski, Pascal avait son gouffre, Nietzche et Rousseau leur folie. Que l´on ne vienne pas nous dire: „Quel dommage qu´ils soient malades“ S´ils  n´étaient pas malades, ils n´auraient pas cherché à résoudre ce problème“


Gide, issue de la grande bourgeoisie faiseuse de névroses, et pire encore! de la grande bourgeoise protestante, se reconnaît de cette famille d´individus qui, sans une certaine tare, ne seraient jamais devenus artistes. On pourrait y  ajouter Flaubert, Sartre,  Proust, Thomas Mann et bien d´autres encore. La maladie d´André Gide porte un nom. Il est homosexuel.  Et élevé dans la honte, la culpabilité, la douleur de n´être „pas pareil aux autres“. Adulte, il n´aura qu´un but: réclamer le droit à la différence et assumer celle-ci. Pour cela Gide n´hésitera pas à s´exposer au rejet, au mépris, à la haine de ses contemporains. C´est pour cette recherche inconditionnelle de la vérité qu´il s´est vu remettre le Prix Nobel de la littérature en 1947. Toute sa vie il s´est inscrit à contre- courant des idées reçues, celles de son temps et de son milieu et s´est préservé une neutralité de pensée qui a fait de lui un marginal soit, mais aussi un maître à penser, un guide spirituel en France, comme à l´étranger.


S´assumer sans honte, sans remords, sans peur, comme un tout de la nature humaine voulue par Dieu, voilà le plaidoyer gidien par excellence. „Ne jugez pas“ dit íl à ses ennemis, particulièrement nombreux dans le camp catholique lequel l´a accusé toute sa vie de mettre en danger les valeurs éthiques et morales de la France bien-pensante, d´être un empoisonneur de la jeunesse. Mais ce qui fascine le plus chez lui, c´est encore cette reconstruction de soi qu´il va entreprendre dès l´âge de 23 ans. Gide passera sa vie à faire mourir en lui le grain empoisonné de son éducation pour faire naître sa vraie nature. „Si le grain ne meurt“! „Familles, je vous hais! Foyers clos, portes refermées, possessions jalouses du bonheur“, cette phrase que l´on peut lire dans les „Nourritures terrestres“ sonne comme le cri du cœur de cet homme qui toute sa vie se battra pour acquérir sa place dans la société malgré sa différence.

 

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